Dépenses de santé à charge des ménages (SHA)

Les dépenses de santé représentent une part importante de la consommation publique et privée, puisque la valeur totale de la consommation finale de biens et services de santé et de soins de longue durée représente environ 10.3% du PIB en 2018. En même temps, nous considérons tous la santé comme un de nos biens les plus importants. Ces arguments à eux seuls soulignent le besoin d’une analyse approfondie et d’un suivi de comment notre consommation de biens et services de soins de santé et de longue durée sont financés, livrés et utilisés. Ce questionnement a amené le développement de la méthodologie dite ‘System of Health accounts’ (SHA) par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Office statistique de l’Union européenne (Eurostat), en collaboration avec les pays membres. Son but était de créer un instrument permettant l’analyse, sur une base comparable, des systèmes de santé dans les différents pays. Une fois cette méthodologie adoptée, la production de ces statistiques a été rendue obligatoire par un règlement européen de 2015[1]. Pour la Belgique, le SPF Sécurité sociale établit ces comptes et fournit ces données à Eurostat.

Dans le SHA, l’estimation de la consommation finale des biens et services de santé et de longue durée est ventilée selon trois dimensions : une dimension « fonction de soins » (selon l’utilisation des biens et services de santé); une dimension « fournisseur » (selon par qui ces services et biens sont produits); et une dimension « financement » (selon qui paie quelle partie de la facture finale).

Dans ce « Focus », nous nous intéressons plus particulièrement à la dimension « financement » et plus précisément aux dépenses de santé restant à charge des ménages ; les ‘OOP’ ou ‘Out-of-Pocket expenditures’. Il s’agit du restant à payer par les ménages/patients après déduction des remboursements et autres interventions en leur faveur. Les dépenses OOP sont souvent utilisées comme un indicateur en lien avec l’accessibilité des soins de santé, dans le sens où un risque existe qu’une part importante des dépenses de santé à charge du patient puisse en limiter l’accès, certainement pour les groupes les plus précarisés.

L’utilisation de cet indicateur doit toutefois tenir compte de quelques considérations/limites. Tout d’abord, il doit encore être démontré dans quelle mesure cet indicateur reflète des dépenses « nécessaires » (et pas des dépenses non nécessaires). Ensuite, il s’agit d’un indicateur « macro » qui ne peut pas être ventilé selon différents groupes spécifiques de la population. Enfin, en ce qui concerne la comparabilité internationale, nous devons tenir compte du fait que les systèmes de remboursement diffèrent fortement d’un pays à l’autre tant au niveau des conditions de remboursement que de la population couverte. Malgré cela, cet indicateur fournit des informations intéressantes.

Le tableau 1 ci-dessous (réalisé sur base des derniers chiffres publiés sur le site du SPF dans la rubrique « chiffres de la protection sociale ») distingue l’évolution des dépenses de santé (exprimées en milliers d’euros) en Belgique selon les principales catégories de financement. Il y a les dépenses dites ‘obligatoires’ : il s’agit des fournitures financées directement par les gouvernements et la sécurité sociale, ou d’autres assurances obligatoires auprès d’assureurs privés. Il y a également les dépenses d’assurances dites ‘volontaires’ du secteur privé : essentiellement celles financées en Belgique par des assurances complémentaires volontaires, des ONG et les employeurs. Et puis, il y a les dépenses à charge des ménages.

Nous pouvons y observer que les dépenses totales de santé n’ont cessé d’augmenter au cours des dernières années pour se situer à plus de 47 milliards d’EUR en 2018, ce qui correspond à 10,3% du PIB. Toutefois, en termes de pourcentage du PIB, les dépenses totales sont restées relativement stables pendant les dernières années.

Le tableau 2 montre que les dépenses des ménages en 2018 représentent 19,1% des dépenses totales de soins de santé en Belgique, soit environ 9 milliards d'euros, ce qui correspond à une dépense moyenne restant à charge de 790,5 euros par habitant (voir également le tableau 5 ci-dessous).

Si on regarde l’évolution proportionnelle des dépenses personnelles par rapport aux dépenses totales, les dépenses des ménages ont légèrement baissé (passant de quasi 20% des dépenses totales à 19,1% en 2018).

Si on regarde la dimension ‘fournisseur’ (ou ‘prestataire’), en Belgique, un peu plus d’un tiers des soins est fourni dans le secteur ambulatoire (y compris les hospitalisations de jour) ; tant en ce qui concerne les dépenses totales de soins de santé que les paiements directs, cette part est comparable (avec respectivement 37,1% et 34,1%).

Cependant, la comparaison s'arrête ici : alors que les ménages paient une part considérable pour des médicaments et d’autres aides dans les pharmacies, ce poste de dépenses est beaucoup plus faible dans les dépenses totales de santé (avec environ 12%). L'inverse est vrai pour les dépenses hospitalières : alors qu'elles représentent 34,0% des dépenses totales de santé, elles constituent 25,6% des dépenses des ménages. Néanmoins, avec une troisième place, cette dépense reste un poste important pour les familles.

Dans la structure tridimensionnelle de SHA, il est également possible de croiser les dimensions ‘financement’ et ‘fonction’, ce qui permet d’analyser l’utilisation des biens et de services de santé par la population.

Le tableau ci-dessous montre que la majorité des OOP vont vers les soins fournis aux patients non admis en hospitalisation ‘classique’, soit 38,7% du total des dépenses OOP. En second lieu, on trouve les dépenses pour des médicaments et des dispositifs médicaux (28,4%), suivis par les soins curatifs et de réadaptation intramurale. Le tableau montre également que les proportions pour les dépenses totales de santé sont différentes : les soins curatifs et de réadaptation intramuraux sont le poste le plus important ici, suivi par les soins fournis aux patients non admis et les soins de longue durée.

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Comme déjà mentionné, les pays membres de l’UE sont obligés de fournir les estimations de la valeur de la consommation finale de biens et services de soins de santé et de longue durée à Eurostat. Ceci permet une comparaison entre pays, ce que nous faisons dans le tableau suivant. Si nous comparons la Belgique avec ses trois principaux pays voisins, on voit que les niveaux des dépenses totales de santé en pourcentage du PIB sont assez proches dans les quatre pays. Par contre, les dépenses à charge du patient (en pourcentage des dépenses totales) sont bien plus élevées en Belgique.

Ceci peut s’expliquer par différents facteurs qui touchent à différentes choses : les modalités de notre assurance maladie-invalidité (tickets modérateurs, l’existence de prestations non remboursables, interventions dans les maisons de repos, etc.), mais aussi par une moins grande importance des assurances complémentaires dans notre pays.

S’il est important de savoir qu’il y a des raisons derrière les différences observées entre pays, il n’est pas du domaine de cette note de les analyser en détail. Mais il faut savoir que des réalités différentes peuvent se cacher derrière : des différences dans la composition des services assurés, des taux de remboursements différents, une couverture différente au sein de la population, etc…

Le SPF Sécurité sociale publie un certain nombre de statistiques relatives aux données belges transmises dans le cadre des comptes de la santé. Tous les chiffres mentionnés dans cette analyse, ainsi que des chiffres supplémentaires, peuvent être consultés sur notre site web.

 

[1] Règlement (UE) 2015/359 de la Commission du 4 mars 2015 portant mise en œuvre du règlement (CE) n ° 1338/2008 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les statistiques sur les dépenses de santé et leur financement

Dépenses de santé à charge des ménages (SHA) (13 octobre 2020) (.pdf)