Forum « La sécurité sociale du futur », partie 2

7 mai 2019

Le second acte du Forum sur la sécurité sociale du futur s'est tenu le 30 avril, dans la salle Pachéco du SPF Sécurité sociale. Environ 300 personnes étaient présentes dans la salle, et 150 personnes ont suivi les débats en livestream.

Durant cette seconde partie, les thèmes suivants ont été abordés :

  • Sécurité sociale et nouvelles formes de travail
  • La soutenabilité financière de la sécurité sociale

Dans son discours d'ouverture, Peter Samyn (Président par intérim) a souligné la dimension internationale de cet événement. Notre sécurité sociale se porte relativement bien par rapport à d'autres pays. Néanmoins, la soutenabilité financière, les nouvelles formes de travail et leurs risques, ainsi que l'adaptation des statuts constituent des défis internationaux. Ce forum stimule ce débat et notre SPF entend jouer un rôle de radar afin de traduire les idées du terrain en actions politiques.

La Commissaire européenne Marianne Thyssen s'est réjouie de constater que l'avenir de la sécurité sociale fasse partie des priorités. Parmi les défis à relever figurent l'insécurité croissante, le vieillissement de la population, l'augmentation de la dépendance, les effets de la migration, l'intégration et le travail, la numérisation et la robotisation. La création d'emplois dans l'économie de plateforme est une belle opportunité, mais elle ne peut donner naissance à un nouveau prolétariat. Une directive a donc été élaborée afin de garantir des droits minimaux dans la nouvelle économie. Le principal enjeu est d'allier coût abordable et protection. Pour y parvenir, une action soutenue est absolument nécessaire. Le socle européen des droits sociaux en est un instrument. Lors du premier sommet social depuis 20 ans, organisé en Suède, les États membres se sont mis d'accord et se sont engagés à le mettre en œuvre.

Francois Pichault (ULg) : nous assistons à une explosion des nouvelles formes de travail, non seulement au moyen des plateformes. Le télétravail, le coworking, l'équilibre travail/vie privée en sont d’autres. Une zone grise s'est créée entre salariés et indépendants. Le statut, les conditions de travail, le contenu du travail et l'autonomie sont devenus des dimensions variables.

Karolien Lenaerts (KUL) : le travail de plateforme est constitué de 3 éléments - la plateforme, le client et le travailleur. De nos jours, cette plateforme est souvent un algorithme. Le statut des travailleurs de plateforme est flou, ce qui pose des problèmes en matière de sécurité sociale. Il n'y a pas de statut distinct et la discussion est actuellement au point mort , tant chez nous que dans d'autres pays. Les travailleurs commencent toutefois à s'unir, d'abord de manière informelle et sur les médias sociaux. Les aspects les plus problématiques sont l'assurance chômage et le régime des accidents du travail. Cependant, bon nombre de ces travailleurs ne s'inquiètent pas, parce que ce travail constitue pour eux une activité d'appoint et qu'ils bénéficient d'une protection dans le cadre de leur emploi principal.

En conclusion, elle a déclaré qu'il serait souhaitable de clarifier le statut des travailleurs de plateforme en matière de droits et d'obligations. En outre, toutes les plateformes doivent être enregistrées et les services d'inspection ont un rôle important dans ce processus. Ces travailleurs ont besoin d'un « helpdesk ». Il serait également utile d'envisager de dissocier l'accès à la sécurité sociale et le statut.

Le débat qui a suivi a mis en lumière les contours imprécis du rôle de l'employeur dans l'économie de plateforme. Il est absolument nécessaire de réglementer les plateformes. Dissocier les droits sociaux du statut est une vieille idée qui pourrait éventuellement être reconsidérée. Dans ce cadre, il est intéressant d'examiner les parcours que suivent les jeunes à l'heure actuelle.

Jean Hindriks (UCL, Itinera) a illustré son argumentation à l'aide de chiffres spectaculaires. Le nombre de retraités est en hausse et le montant moyen de la pension a augmenté. Sur une longue période, les cotisations sociales augmentent aussi. Mais, depuis 2003, les pensions augmentent beaucoup plus que les cotisations, environ deux fois plus. De nos jours, les gens travaillent moins longtemps pour une pension plus élevée. Notre monde change, mais pas les pensions. Une variante de la pension à points peut constituer une proposition de modernisation des régimes.

Dans son exposé, Alain Jousten (ULg) a plaidé en faveur du dépassement de la logique budgétaire pure dans le cadre du financement. Les évolutions démographiques et technologiques exercent une pression sur la sécurité sociale. C'est au niveau des soins de santé et des pensions que les enjeux sont les plus importants. L'une de ses propositions est de mettre en place un lien clair et crédible entre les cotisations sociales et les pensions. 

Au cours du débat qui a suivi, il a notamment été question de l'impact de la migration sur le financement de la sécurité sociale.

Veerle Miranda (OCDE) a conclu par un résumé de la journée. Elle a fait remarquer, à juste titre, que si les enjeux sont clairs, les solutions ne le sont pas. Il y a plus de questions que de réponses. Sous l’angle de vue international de l'OCDE, elle a pu confirmer que la sécurité sociale de notre pays fonctionne relativement bien pour les travailleurs classiques. C'est un peu moins le cas pour les nouvelles formes de travail, mais nous nous classons malgré tout parmi les meilleurs élèves de l'UE. L'accès à la protection sociale est plus difficile pour les personnes qui exercent une forme de travail atypique, car elles ne remplissent souvent pas les conditions requises pour le chômage, etc.

Les présentations des orateurs peuvent être consultées sur le site web du SPF, où vous trouverez aussi les vidéos et quelques photos de cette journée réussie.